katamalta & Co.

Il y a une bonne douzaine d’années, j’ai fait un très malheureux face à face avec une moufette, en plein centre-ville de Toronto. J’ai presque marché dessus, en fait. L’animal a été surpris autant que moi, sinon plus, et malgré la rapidité à laquelle j’ai tourné les talons pour m’enfuir le plus loin possible, j’ai été victime du système d’auto-défense de la petite bête.

En général, ça arrive aux chiens, des fois aux chats, rarement aux personnes. Sans entrer dans les détails, le processus d’élimination de l’odeur qui a imprégné les vêtements que je portais (et que j’ai déposé dans un coin de mon studio pour me changer, libérant ainsi les molécules parfumées dans toute ma demeure, jusqu’au coeur de chaque fibre textile), a demandé trois semaines de multiples brassées de lavage quotidiennes.

C’est un mauvais souvenir dont je rigole – c’était sans conséquence dramatique – mais quelle eeeemmmmerde magistrale, cette mésaventure.

J’ai raconté par la suite cet épisode nauséabond à un couple d’amis, couple qui demeure aujourd’hui en campagne boisée, près d’une jolie rivière.

Cet automne, parmi le trafic animal qu’ils observent de leur maison, une paire de moufettes.

En mon honneur, la paire a été baptisée katamalta* & Co. S’il n’y en a qu’une qui se balade, c’est katamalta, c’est sûr.

Je me sens privilégiée. Ce n’est pas tout le monde qui peut se vanter d’un tel honneur, après tout.

 

* J’utilise katamalta ici plutôt que mon vrai prénom dont la moufette a réellement été baptisée, puisque je fais semblant de croire qu’il m’est possible de demeurer, sur cette page, anonyme.

 

de lâcheté et de témoins

Il semble que le temps des fêtes qui approche engendre une recrudescence du porte-à-porte de très nombreux organismes.

Il y a une dizaine de jours, on sonne chez moi; une paire de porte-à-porteux se présente par l’entremise de l’interphone, et malgré le flou de l’introduction, je saisis que l’objet de la visite est d’ordre religieux, possiblement une demande de financement. On est à Malte, pays où même de jeunes hommes fougueux font apposer des autocollants ALMIGHTY YAWVEH à la vitre arrière de leurs voitures, donc la conclusion de l’intention de mes visiteurs était facile à tirer.

Par pure lâcheté, plutôt que de répondre que ça ne m’intéresse pas, j’ai joué la carte linguistique. J’ai pris mon plus bel accent du francophone qui parle en anglais et j’ai répondu que je ne parle pas, justement anglais (I don’t talk ze Enngliche langgouadge). La dame me demande ma langue, suite à ma réponse me demande si elle peut glisser dans la boîte à lettre, son petit dépliant en version française. Par seconde lâcheté, j’ai dit yesyes, ciaociao.

J’ai hier décidé que le colis en provenance du Québec que j’attends allait m’être livré le jour-même. Ainsi, lorsque j’ai entendu sonner à la porte, j’ai simplement ouvert la porte du hall, joyeuse à l’idée du pouvoir de la détermination de l’esprit sur les services de livraison internationaux.

Je tombe dans le hall sur une paire tout bien endimanchée, me demandant “C’est vous la française? Nous sommes témoins de Jehovah, votre adresse nous a été communiquée par une dame qui est venue la semaine dernière, et qui nous a demandé de venir vous voir pour discuter dans votre langue”.

Je vous épargne le reste. Le témoin de Jehovah est universel, bien que j’aimerais en voir l’espèce allemande, donc vous savez de quoi je parle.

Témoin de J: Vous connaissez les témoins de Jehovah du Caaanaaadaaa? Ils sont bien moi je trouve, dit-elle.

Cette fois-ci, pas de lâcheté, j’ai bien fermement demandé à ce qu’aucun suivi de mon désintérêt ne soit effectué. À suivre, j’ai bien peur.

yesyes, ciaociao

Les Maltais ont pour langue première, le maltais, et l’anglais pour langue seconde. C’est plus une vraie deuxième langue qu’au Québec ou au Canada par exemple, vu qu’ils sont, ou semblent tous jusqu’à présent, très fonctionnels en anglais. L’île vit en partie grâce au tourisme, je présume que ça explique. L’autre source d’emploi est le online gaming.

Je me permet ici de généraliser. On dirait qu’ils sont fonctionnels, mais sans être bilingues. Ce n’est aucunement un reproche, mais dès qu’on tente de sortir du vocabulaire usuel, ils ne comprennent pas et répondent ce qui leur passe par la tête. Le maltais courant intègre aussi plusieurs mots d’anglais, par exemple, les nombres sont souvent dits en anglais au milieu d’une phrase maltaise.

De mon balcon sur la rue, au 1er étage, j’ai un poste d’observation socioculturelle de la faune locale parfait. Ou dit autrement, un poste parfait pour être senteuse. J’adore regarder et écouter les gens sur la rue.

Ce qui me fait craquer chaque fois, c’est quand ils parlent (presque toujours très fort) au téléphone. D’abord, ils ne semblent pas dire yeah. Donc l’équivalent de notre ouin ou ouais n’existe pas. Ils disent plutôt: yesyes, rapidement, bien prononcé. Ouiiouii. Pas ouéoué, pas yeeaaah, pas juste yes, toujours yesyes. Tout le temps. Et ils semblent mettrent beaucoup de temps à raccrocher lorsque l’appel se termine, et puisque leur équivalent de notre byebye, ou byyyyye est ici ciaocioa, leurs phrases sont ponctuées de yesyes ciaociao à qui mieux mieux.

C’est trop mignon.

yesyes, ciaociao.

après la multiplication des pains, celle des minutes

Comment transformer un maigre trois minutes de contenu conversationnel au téléphone en 12 à 15, tout en obtenant mille louanges de n’avoir en fait rien à dire?

Procéder à la conversation en allemand!

Ceci dit, si l’interlocuteur ne parle pas allemand lui ou elle non plus, l’appel de trois minutes en deviendra probablement un de 30 secondes avant que ledit interlocuteur ne raccroche. La stratégie n’est donc pas recommandable en tout contexte.

Mais pour étirer le vide, s’exprimer en une langue qu’on ne parle en fait pas réellement fonctionne admirablement bien.

Héritage, parti en fumée

Ma nouvelle voisine de palier n’est pas la vieille petite dame espérée.

Elle a plutôt la le look d’un Slovène dont l’épouse, enceinte, arrivera sur l’île sous peu.

On ne peut pas toujours avoir ce qu’on veut, paraît-il.

Sur un autre thème, les palmiers décorés de lumières de Noël, ça ne met pas du tout dans l’ambiance des Fêtes. Mais comme c’est rigolo!

 

le mur

J’ai pour nouveau voisin d’en face un ancien stade de foot extérieur, laissé à l’abandon depuis, à en juger par la victoire de la faune sur le ciment des ex-estrades, un bon nombre d’années.

Celui-ci a été emmuré, avec barbelés(!) pour une raison qui m’échappe; les parcs urbains brillant par leur absence dans la région, ça sent l’opportunité manquée. Je présume que le terrain et anciennement le stade n’appartiennent pas à la ville. Mais qu’en sais-je.

Le mur n’est pas particulièrement sympathique avec ses barbelés rouillés, mais a pour avantage d’être un voisin d’en face très peu envahissant.

Future héritière ou l’épargne-retraite alternative

J’aurai les clés de mon futur appartement vendredi; j’y emménagerai sûrement le jour même ou au courant du weekend. Le plus tôt sera le mieux.

Un second appartement, sur le même étage que le futur-mien, est à louer. J’ai demandé à l’agente d’immeuble de me trouver, pour voisine, une petite vieille dame. Je l’imagine petite, mais elle pourrait aussi être grande ou ronde, c’est sans ségrégation.

Ladite vieille dame, que j’espère maltaise plutôt qu’expat, serait idéalement un peu sourde, mais pas trop, serait ravie de m’apprendre un peu de maltais, et enchantée de s’occuper du chat lorsque je devrai m’absenter, une fois bien sûr Chat arrivé.

Je me ferai un plaisir de la visiter régulièrement et de lui cuisiner des petits plats, l’aider avec les courses aussi. Sans famille, elle se prendra d’affection pour moi. Et un jour, lointain, j’apprendrai qu’elle m’a laissé toute sa fortune.

Mais la voisine pourrait très bien aussi être une super chic fille dans la mi-trentaine. Idéalement, la pointure de ses chaussures serait 37. Ce profil me conviendrait aussi.

 

Tous les chemins mènent à Laval

La statistique est un outil comparatif et cognitif tout aussi formidable que douloureux.

Nombre d’habitants

Laval 399 000 / Malte 417 000

Superficie

Laval 245 km2 / Malte 316 km2

L’épicier du coin

Les épiceries sur l’île n’ont rien en commun avec ce que l’on connaît en Amérique du Nord, ni d’ailleurs avec ce qu’on trouve dans les pays « riches » européens. Pensez plutôt à un dépanneur de cartier dans Villeray, mais remplissez le local de denrées alimentaires de toutes sortes: conserves, pâtes, riz, viande congelée (pour la viande fraîche, il faut aller chez le boucher) produits congelés, sucreries.. bref, un peu, de tout, mais en variétés limitées. Et surtout, pêle-mêle, souvent jusqu’au plafond.

Par exemple, un client cherchait du gel-douche; le proprio de la place a grimpé dans une échelle, en a descendu les trois bouteilles disponibles que le client a humées avant de choisir.

Ces « supermarchés », comme ils les appellent, sont un peu partout, presque à chaque pâté de maison (pâté, le mot est bien choisi). Le hic, c’est les fruits et légumes. L’ile en produit beaucoup et en importe peu, ce qui limite la sélection. C’est bien de manger local, avec les inconvénients qui viennent avec. Dans mon bout d’île, il y a un seul commerce qui vend quelques fruits et légumes frais. On fait avec ce que le marchand a.

Les villages ont aussi souvent leur marché hebdomadaire, ou encore, le camion à légumes.

Il passe deux fois par jour sur ma rue, stationne, klaxonne quelques coups, reste environ 20-30 minutes. Oignons, pommes de terre, tomates… Ça dépanne. Les camions passent dans chaque secteur de l’île, ou presque, faut simplement savoir où et environ à quelle heure.

J’ai fait la tournée des épiciers plus tôt aujourd’hui, et j’ai trouvé du bonheur en petit pot!  La moutarde a une drôle de couleur, mais côté saveur, ça se rapproche. Et – oh merveille après trois années allemandes, j’ai trouvé de la mayonnaise Hellmans! Les allemands appellent mayonnaise un truc dont la saveur (assaisonnement au goût chimique) rappelle plutôt une vinaigrette ranch cheap diluée qu’autre chose. Vive la Hellmans!